Transidentité, à la frontière des genres

transidentite(article publié le 10 février 2015)
Garçon ou fille. A croire que le monde est forcément binaire, classifié dans des boîtes. Beaucoup de personnes n’arrivent pas à se définir… ou plus exactement ils, elles, y arrivent mais en marge des formulaires d’état civil. La transidentité existe et existera toujours. Ne pas se reconnaître dans le sexe attribué à notre naissance, ce n’est pas une maladie. Cela peut-être temporaire ou définitif. Il faut pouvoir l’accepter et que la société l’accepte également.
Encore moins nombreux que les gays et les lesbiennes, les personnes transidentitaires n’ont pas beaucoup d’espace de parole. En Normandie, comme dans d’autres régions en France, il existe des lieux qui permettent de se poser, de se retrouver et d’être écouté. Aujourd’hui à Caen, demain dans l’Orne, le Centre LGBT de Normandie a ouvert depuis 2012 une permanence pour les personnes qui s’interrogent sur leur identité. Rencontre avec Allan qui a rejoint le Centre depuis juin 2014 aux côtés d’Andréa.
 
tomboy-film GAYVIKING : Que diriez-vous à une personne qui se pose les premières questions sur son identité… ou une personne qui n’arrive pas à accepter son sexe de femme ou d’homme ? Comment vous intervenez ?
Allan: Je pense qu’il y a une période d’écoute importante, de premiers échanges avec respect et attention. Les premiers sentiments peuvent être un sentiment de honte à ce qu’on éprouve, ou d’interdit, on ne sait pas à qui en parler sans être jugé ou sans décevoir ses amis, sa famille ou ses proches. Je ne suis pas psychiatre ni psychologue mais je peux aider à orienter la personne vers les interlocuteurs spécialisés sur la question d’identité. Je peux partager aussi mon expérience étant moi même dans le parcours.
 
existransGAYVIKING : Le 18 octobre dernier, c’est déroulée à Paris la 18 éditions des Existrans où 5000 personnes se sont rassemblées pour revendiquer plus de droits et de reconnaissances. La dernière loi sur le mariage pour tous (et adoption) n’a t’elle rien réglée pour les personnes en transidentité ?
Allan: Malheureusement non, même si la loi du mariage pour tous à été une très grande avancée, celle ci n’a rien changé pour les personnes en transidentité. Andréa et moi étions présents à ce rassemblement, nous étions effectivement nombreux à faire entendre nos voix pour plus de droits. Actuellement le parcours est toujours long et coûteux. C’est un psychiatre qui doit donner son accord pour débuter une hormonothérapie, ce qui peut être très long. Certains ont des difficultés à trouver un psychiatre pour les suivre, le problème étant le même pour tous les autres interlocuteurs du parcours (endocrinologue, chirurgien…). Pour notre nouvelle identité là aussi ce n’est pas simple car il faut saisir le Juge au TGI de son département, constituer un dossier avec des preuves d’actes chirurgicaux, des attestations. Tout ceci avec l’assistance d’un avocat. Il se peut que des contre-expertises soit encore mandatées par les juges, et elles sont souvent acceptées par peur de se voir refusé le changement d’identité. On se sent humilié et on perd toute dignité.
 
trans-gnGAYVIKING : Les anti-mariage pour tous exposent souvent une théorie du genre, existe t’elle ? Vous en pensez quoi ?
Allan: La fameuse théorie du genre a déjà été mentionnée il y a des années. Elle a été remise au goût du jour depuis peu avec effectivement les anti- mariage pour tous, et de plus belle avec l’enseignement ABCD de l’égalité dans certaines écoles. En premier lieu, le mot théorie me dérange dans le sens où ce mot désigne une pensée, hors il est question d’égalité entre chaque individu, qu’il soit homme, femme, trans, asexué. Je peux comprendre que certains changements d’habitude ou de croyance peuvent faire peur, déstabiliser ou encore provoquer un sentiment d’insécurité. Mais non, le bleu n’est pas forcement pour les garçons, c’est pas toujours la femme qui doit faire la vaisselle, on peut aussi offrir à noël « le stand de marchande » à son fils ou la voiture « Cars » à sa fille et en passant je ne sais pas bricoler et mon amie à un superbe sens de l’orientation sur la route!
 
GAYVIKING : Depuis 2012, le Centre LGBT de Normandie est le seul lieu où les transidentitaires peuvent trouver une écoute dans la région. D’où vient votre public, est-il seulement de Caen ?
Allan: Je suis rentré en contact avec des personnes des départements de l’Orne, de la Manche et de la Mayenne. La région est vaste et les personnes dans le besoin se situent un peu partout en Normandie, pour certain il est difficile de venir au Centre LGBT de Normandie à Caen. Pour ma part, je prend contact via internet, étant résident dans l’Orne.
 
victoire-trans
GAYVIKING : Quels sont vos projets de développements ?
Allan: Nous sommes partis du constat que le Centre LGBT de Caen était trop loin pour certains départements, qu’il fallait encore plus de proximité pour plus de visibilité. Je souhaite m’investir et aider les personnes qui s’interrogent sur leur identité ou qui ont besoin d’assistance sur leur parcours. En accord avec le Centre LGBT, nous avons pour projet d’ouvrir une permanence dans la ville de Flers dans l’Orne une fois par mois. L’idéal étant d’avoir des permanences dans chaque département pour couvrir toute la Normandie. De faire une permanence dans une ville rurale permettrait de donner plus de visibilité à la cause des transidentitaires, des transsexuels, dans un milieu où les traditions et les valeurs sont importantes dans le noyaux familial et peut se montrer dissuasif quand au besoin de questionnement ou de changement d’identité.
Le vendredi 6 mars 2015, nous organisons une première réunion d’échange pour les proches, familles, amis autour de la transsexualité. Une réunion en toute convivialité pour permettre des rencontres, de parler, de ne pas se sentir seul quand on est parent d’un enfant qui ressent le besoin de changer de sexe. Cette réunion aura lieu au Centre LGBT de Normandie, le Maison Des Diversités, 74, boulevard Dunois, à Caen et sera animée par Andréa et moi même. Alors n’hésitez pas à venir, vous n’êtes pas seul, d’autre familles sont passées par là.
GAYVIKING : Un dernier mot ?
Allan: MOBILISATION ! Plus que jamais d’actualité!
 

ecouteÉcoutes et rendez-vous :

En Normandie : le  Centre LGBT de Normandie organise à Caen le troisième mercredi de chaque mois à la maison des diversités une permanences d’écoute, de soutien et d’informations relatives au sujet transidentitaire de 18h et 20h à son local (74 boulevard Dunoi à Caen)… et prochainement à Flers dans l’Orne : www.centrelgbt-normandie.fr
A Toulouse : l’association Arc-en-Ciel a mis en place des permanences d’écoute et groupe d’aide : www.aectoulouse.fr
A Nice : le centre LGBT de la côte d’Azur héberge également des permanences : www.centrelgbt06.fr
A Strasbourg : le centre alsacien organise des permanence et reçoit sur rendez-vous : www.lastation-lgbti.eu
En Bretagne : Andbraiz réalise des moments conviviaux d’écoutes pour toutes les personnes notamment trans : www.andbraiz.com. De même à Rennes, le centre LGBT, généralement le dimanche, un lieu d’écoute existe : www.cglbtrennes.org
A Lille, l’association « c’est pas mon genre » a été créé spécialement pour les personnes en question sur leur identité de genre : www.cestpasmongenre.com
 

lettre-tDéfinitions :

Kesako… Lorsque l’on parle de transsexualisme, de transidentité… la fameuse lettre T :
La Transidentité est le fait de ressentir une inadéquation entre son corps et son ressenti intérieur d’être un homme ou une femme. La société définit généralement un individu comme homme ou comme femme en se basant sur son anatomie (soit son appareil génital reproductif !). Pour comprendre la notion de Transidentité, il importe donc de distinguer le sexe et le genre. Le sexe se basant essentiellement sur l’aspect biologique de la personne alors que le genre intègre les aspects sociaux et psychologiques de l’individu.
« Transsexuel(le) : Le transsexuel est un homme dans le corps d’une femme. La transsexuelle est une femme dans le corps d’un homme. C’est une sorte de conflit entre le genre, qui est le sexe psychologique (en gros), avec le sexe physique et son rapport à la société. la personne transsexuelle peut avoir recours à un traitement hormonal pour changer son corps, ainsi qu’a diverses opérations chirurgicales. la personne transsexuelle ne choisit pas de changer de sexe, c’est une nécessité. Il n’y a bien sûr, aucun lien avec l’orientation sexuelle.
Travesti(e) : le/la travesti(e) est une personne qui se défini clairement dans un genre donné, mais qui a parfois des envies d’assumer, publiquement ou non, sa virilité ou sa féminité, en portant les vêtements du sexe opposé, pour en adopter les codes et reconnaissances sociales. Je précise qu’il n’y a pas de lien avec les rapports sexuels, comme on l’entend souvent. Une personne travestie, ne se travesti pas dans un but sexuel.
Intersexué : Il est celui que l’on nomme parfois « hermaphrodite », soit une personne née avec les deux sexes. Actuellement encore, on le considère comme une maladie, et il est souvent demandé aux parents de choisir le sexe de l’enfant à la naissance. En réalité, l’intersexué se ressent le plus souvent comme appartenant aux deux sexes, simultanément ou alternativement, et lorsque le sexe a été choisi à la naissance et qu’une ablation de l’autre a été pratiqué, il n’est pas rare que l’intersexué se sente mutilé. »
 

icone-videoSélection reportage :

Voici le témoignage de Florian qui explique son parcours, ses opérations. Un superbe reportage. Un autre regard sur la question.
(source documentaire : France Télévision)

 

icone-web Pour aller plus loin :

– un beau portail sur la transidentité avec une communauté active : Txy (cliquez ici)
– association nationale Transgenre (anciennement trans-aide avec plusieurs antennes en France) (cliquez ici)
transidentité – site d’informations (cliquez ici)
– Forum i-trans (cliquez ici)
Existrans : la marche annuelle pour les droits des trans qui se déroule à Paris (cliquez ici)
Rue89 – transexualisme dans l’actualité (cliquez ici)
– Relire l’article-interview sur GAYVIKING en avril 2012 avec Andreas à Caen (cliquez ici)
 
(sources images : première photo issue de la série Illes composée de 15 photographies en noir et blanc de Carine Parola – deuxième photo : film Tomboy)
 

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